Amener son chien au bureau : que dit la loi ?

   
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Le 25 juin dernier, les américains célébraient le « Take your dog to work day ». Cet événement, célébré depuis plusieurs années, illustre l’engouement des américains pour la présence des chiens au bureau.

 

 

Si le phénomène est moins présent en France, il tend à se développer. Que dit la loi à ce sujet ? Clarisse Chevalier apporte son éclairage.

 

 

1. Pas d’interdiction générale

 

 

La possibilité d'amener son chien au bureau ne fait pas l'objet d'une interdiction générale en France. Elle est donc, en principe, autorisée. Il existe néanmoins quelques interdictions : certaines résultent de la loi, d’autres des règles sont mises en place par les employeurs.  

 

 

a. Interdiction spéciale de la loi

 

 

Si la loi n'interdit pas la présence des chiens dans les entreprises de manière générale, ils sont néanmoins interdits dans :

 

- Certains établissements de santé[1], sauf pour les chiens de thérapie habilités

- Certaines entreprises du secteur alimentaire

- Certaines administrations publiques

- Pour toutes les structures recevant du public : les chiens de 1er catégorie.[2]

 

 

Ces règles ne concernent pas les chiens d’assistance.[3]

 

 

b. Interdiction par l’employeur

 

 

L'employeur peut interdire la présence des chiens dans les bureaux. Il appartient en effet à l’employeur de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs »[4].

 

 

Certaines personnes peuvent être allergiques ou mal à l'aise en présence d'un chien. La présence d'un chien peut altérer les conditions d'hygiène et de sécurité au sein de l'entreprise.

 

 

Cette interdiction peut notamment être prévue par une mention dans le règlement intérieur ou par une mention dans le contrat de travail.

 

 

Le règlement intérieur permet, en effet, de définir notamment « Les mesures d'application de la réglementation en matière de santé et de sécurité dans l'entreprise ou l'établissement ».[5]

 

 

2. Privilégier la prudence

 

 

En l'absence d'interdiction, il reste néanmoins préférable d'obtenir l'autorisation de son employeur avant d'amener son chien sur son lieu de travail.

 

 

Le salarié, comme l'employeur, est tenu à une obligation générale de sécurité. Il incombe à chaque salarié de prendre soin de sa sécurité et de celle des autres. Le salarié est responsable de ses actes et omissions sur le lieu de travail :

 

« Conformément aux instructions qui lui sont données par l'employeur, dans les conditions prévues au règlement intérieur pour les entreprises tenues d'en élaborer un, il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail. »[6]

 

 

Le salarié qui amène son chien sur son lieu de travail, même avec l’autorisation de l’employeur, est responsable des agissements de son chien.

 

 

En 2011, la Cour de cassation a validé le licenciement pour faute grave d’un salarié dont le chien – amené sur le lieu de travail – avait agressé et blessé un collègue. Les magistrats ont estimé que le salarié avait  manqué à son obligation de ne pas mettre en danger, dans l'enceinte de l'entreprise, d'autres membres du personnel.[7]

 

 

Un salarié qui amène son chien sur le lieu de travail, même avec l'autorisation de l'employeur, est donc responsable des agissements de l'animal.

 

 

L’employeur doit également agir avec prudence avant d’amener son propre chien sur son lieu de travail. L’employeur engage également sa responsabilité si son chien attaque un salarié ou place un salarié dans un état de malaise ou de stress.

 

 

La Cour d’appel de Bordeaux a jugé qu’était justifiée la prise d’acte de la rupture du contrat de travail d’une salariée travaillant dans des locaux où se trouve régulièrement un chien de catégorie 2 (rottweiler) non muselé appartenant à l’employeur. La salariée avait été mordue par le chien :

 

 

« C'est à juste titre que les premiers juges ont estimé qu'en tout état de cause, il était établi et d'ailleurs non contesté par l'employeur lui même que Mme R. était amenée à travailler dans des locaux où se trouvait régulièrement un chien Rottweiler non attaché puisque M. F. déclare qu'il l'attachait lorsque des visiteurs venaient et non muselé.


Même si ce chien était parfaitement éduqué et si M. F. était un maître avisé et prudent, il n'en demeure pas moins que la crainte exprimée à partir du 1er octobre par Mme R. était objectivement justifiée et aurait dû être prise en compte par M. F.

 

« Mme R., comme l'a justement dit le premier juge, démontre que son employeur, en ne répondant pas à ses demandes tendant à ne plus être amenée à rencontrer sur son lieu de travail un chien classé en deuxième catégorie et qui doit donc être gardé dans des conditions particulières qui n'étaient pas respectées, n'a pas rempli ses obligations de sécurité par rapport à sa salariée » [8]

 

 

Dans l’intérêt de tous, il est donc préférable qu'un écrit organise les modalités encadrant la présence de chiens sur le lieu de travail (note de service, règlement intérieur...).

 

Mise en ligne le 07.07.2021

 

 

 

 

 

 

 

[1] Article R1112-48 Code de la santé publique

[2] Article L211-16 Code rural

[3] Article 88 de la loi n° 87-588 du 30 juillet 1987

[4] Article L4121-1 Code du travail

[5] Article L1321-1 Code du travail

[6] Article L4122-1 du Code du travail   

[7] Cass. soc. n°10-18.862 du 04-10-2011

[8] CA Bordeaux n° 09-00129 du 14-9-2010

A propos de l'auteur

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Avocat au Barreau d'ANGERS Titulaire d’une maîtrise de droit privé et d’un DEA d’Histoire de la science juridique européenne obtenus à la faculté... En savoir +

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Clarisse CHEVALIER

Avocat au Barreau d'ANGERS

Titulaire d’une maîtrise de droit privé et d’un DEA d’Histoire de la science juridique européenne obtenus à la faculté de droit de Nancy, Clarisse CHEVALIER est inscrite au Barreau d’Angers depuis 2012 et a rejoint le cabinet LEXCAP en début d’année 2014 après une expérience professionnelle débutée auprès d’une étude d’avoués à Paris et poursuivie notamment au sein du service social d’un cabinet d’expertise comptable.

Me Clarisse CHEVALIER exerce son activité exclusivement en droit social.

Au sein de l’équipe de droit social, Me Clarisse CHEVALIER dédie son activité au domaine du conseil et plus particulièrement dans l’accompagnement :

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